Homélie de rentrée pastorale à La Peinière

Homélie de Monseigneur Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, pour la messe de rentrée pastorale du diocèse de Rennes au sanctuaire de Notre-Dame de La Peinière, dimanche 10 septembre 2017.

Lectures :
1re lettre de Saint Paul aux Corinthiens 12,3b-7.12-13
Psaume 103
Saint Luc 1,39-56

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> Reportage sur le pèlerinage de rentrée pastorale du 10 sept. 2017

 

Le Bon Dieu est bon, il fait souffler le vent qui est un symbole de l’Esprit Saint pour que nous entendions bien la première Lecture (1 Corinthiens 12, 3B-7.12-13).

Nous accomplissons les uns et les autres des « services » très différents, de façon visible ou de façon cachée ; parfois ce sont des services très difficiles au sein même de sa famille ou des services communautaires accomplis avec d’autres. Saint Paul nous dit : « C’est toujours le même Esprit. » Oui, l’Esprit Saint est toujours là. C’est l’Esprit Saint qui fait de nous des serviteurs et qui nous envoie pour que nous nous rendions service les uns aux autres. Plus que cela, si l’Esprit Saint nous est donné, ce n’est pas seulement pour que nous discernions le bon service à rendre, le service qui correspond exactement à ce don l’autre a besoin, mais c’est pour que nous accomplissions tous notre service avec charité, avec amour.

Aujourd’hui, en cette Rentrée pastorale, que nous soyons présents à Notre-Dame de la Peinière, ou par RCF Alpha, nous pouvons tous demander à l’Esprit Saint qu’Il remplisse notre cœur d’une charité plus grande, d’une tendresse plus délicate, d’une miséricorde plus attentive. Oui, nous n’avons jamais fini de grandir dans l’amour. Que c’est beau une communauté, une Église, une famille qui a conscience qu’elle grandit dans l’amour, alors même que parfois les difficultés sont si grandes, la souffrance si lourde. Oui, Marie debout au pied de la croix est une femme qui a grandi encore dans l’amour.

La statue de Notre-Dame de La Peinière portée en procession
La statue de Notre-Dame de La Peinière portée en procession

Dans l’Évangile que nous entendons, que nous connaissons bien, Marie, cette jeune fille qui est enceinte de Jésus, « part en hâte – selon certaines traductions – vers les régions montagneuses de la Judée » (Luc 1,39). Elle va voir sa cousine Élisabeth qui elle aussi, dans sa vieillesse, attend un enfant. Elle part « en hâte » ! Le mot qui est mis par saint Luc ne signifie pas la précipitation mais la hâte du cœur, le zèle, l’amour. Elle brûle d’amour. C’est pour cela qu’elle part. Voilà Marie ! Voilà qui est Notre-Dame de la Peinière ! Elle est une femme brûlée par la charité ; elle se laisse emporter par ce feu. Cela ne veut pas dire qu’elle fait de grandes choses mais les petites choses de sa vie sont faites avec un grand amour.

Comme je l’ai annoncé ce matin, je voudrais vous dire que c’est notre vocation à tous, à chacun d’entre nous, qui que nous soyons. Ainsi nous pouvons sans cesse demander à l’Esprit Saint, chaque matin : « augmente en moi l’amour, augmente en moi la charité. » Oui, l’Esprit Saint répand dans nos cœurs la charité, l’amour (Romains 5,5). On voit bien que Marie, sur laquelle l’Esprit Saint a reposé, qui était sous l’ombre de l’Esprit, ne le fut pas simplement pour concevoir Jésus en son sein, mais certainement pour recevoir aussi un amour en elle, un amour habité par une dynamique de croissance. Et cet amour a grandi à tel point qu’il est devenu l’amour d’une « mère » pour tous ceux et toutes celles que Dieu aime, que Jésus sauve, c’est-à-dire tous les fils et les filles de Dieu, c’est-à-dire l’humanité entière. Quel amour, quelle charité dans le cœur de Marie ! Si nous lisons les Évangiles, elle n’a rien fait d’extraordinaire, pas de grandes actions, non, mais elle a aimé.

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À cette lumière, nous avons sous les yeux sainte Mère Teresa de Calcutta qui elle aussi fut une femme qui a vu l’amour grandir en elle. Elle est « sortie » vers tous les pauvres de Calcutta et ailleurs dans le monde.

Dans notre diocèse, nous avons aussi une sainte, une petite sainte qui a vécu à Betton, Léontine Dolivet, décédée en 1974. Elle n’a rien fait d’extraordinaire dans la simplicité de sa vie, restant toute sa vie à Betton, mais elle a aimé. Je voudrais vous lire simplement trois phrases d’elle trouvées dans ses carnets. Le père Francis Orhant, qui est décédé avant-hier soir, a écrit la vie de Léontine. Il confie de façon très simple qu’il ne sait pas si elle sera canonisée au Ciel, mais il est convaincu que c’est une sainte. Léontine est catéchiste et s’occupe des garçons puisque l’école catholique a été fermée en 1903, les Congrégations catholiques enseignantes ayant été exclues de France. À 15 ans, en cette année 1903, elle sent au fond de son cœur un « Appel » de Dieu.

Léontine Dolivet
Léontine Dolivet

Elle écrit à 30 ans : « Pauvre petits, comme je les aime ! Plus que jamais mon cœur leur est profondément attaché. Je crois que le Maître – c’est Jésus – a déposé dans mon âme quelque chose de l’amour dont son cœur débordait en faveur des enfants. »

Trois ans plus tôt, à 27 ans, elle confie : « Je comprends les prédilections du Maître pour les enfants. Je Le remercie d’avoir déposé au fonds de mon cœur quelque chose de cette tendresse qu’Il avait pour eux et je Le supplie en augmentant mon amour pour Lui d’augmenter aussi, si toutefois il est possible, mon amour pour les chers enfants qu’Il m’a confiés, bien convaincue que dans l’œuvre de l’éducation rien ne se fait sans amour. » Voilà que Léontine, à 27 ans, comprend que tout se fait par amour et elle demande à Jésus d’augmenter en elle la charité, l’amour.

Elle  expérimente sa faiblesse, elle voit bien que c’est difficile, qu’elle n’y arrive pas, et pourtant quelle fidélité à accueillir les garçons pour leur expliquer l’amour de Dieu, pour « couler goutte à goutte l’amour de Dieu dans leur cœur », comme elle dit. Voici ce qu’elle écrit : « Sentant mon impuissance devant l’étendue de la tâche, je supplie chaque jour Jésus d’y suppléer et de faire Lui-même ce que je ne puis faire malgré mes désirs. Mes désirs ! Ils sont immenses. Je voudrais dans tous les cœurs des enfants allumer le feu de l’amour. Mes désirs ! Je voudrais atteindre toutes les âmes d’enfants. » Il est vrai que l’amour se transforme toujours en désirs : désir de faire connaître Jésus et l’Amour de Dieu.

Aujourd’hui, nous pouvons penser au pape François qui termine son voyage en Colombie. Comme il l’a dit lui-même, quand il était archevêque de Buenos Aires, en Argentine, il souffrait car il y avait tant d’enfants qui ne savaient pas faire le signe de la Croix !

Oui, mes amis, au cœur de notre « Démarche synodale » que nous vivons dans tout le diocèse, où nous cherchons comment faire pour rejoindre nos contemporains, quel qu’ils soient, des plus petits aux plus âgés, des mieux portants aux plus malades, que sais-je, rejoindre chacun, chacune, demandons les uns pour les autres et pour tout le diocèse la grâce d’une charité qui grandisse dans nos cœurs, dans nos communautés, dans nos familles, dans notre diocèse car, en vérité, rien ne peut se faire dans la mission de l’Église, dans le service que nous accomplissons, ici ou là, sans l’amour.

Je termine par une petite phrase de Léontine Dolivet. Elle note sur son carnet : « Faire de ma vie, seconde après seconde, un acte d’amour. »

Que sainte Mère Teresa prie pour nous et nous obtienne cette charité ; que Léontine Dolivet prie pour nous et nous obtienne cette charité.  Mais surtout que Marie, « la mère de Jésus », cette femme qui aime, à nulle autre pareille, qui est « bénie entre toutes les femmes » (Luc 1, 42) prie pour nous. Particulièrement pour ceux et celles qui ont de grosses difficultés dans leur mission, dans leur mission de parents, de soignants, d’éducateurs, d’accompagnement des personnes fragiles d’une manière ou d’une autre. Oui, que Marie prie pour nous tous et nous obtienne la grâce de la joie d’aimer.