L’origine du Carême

À Rome comme en Orient, l’usage s’était répandu dès le IIIe siècle de jeûner pendant toute la semaine précédant la fête de la Pâque du Christ. Ce jeûne de purification devait s’étendre à toute l’Église dans le cours du IVe siècle sur une période de quarante jours qu’on appela la quadragesima [1], le Carême.

Un jeûne de quarante jours existait déjà en Égypte dès la fin du IIIe ou au début du IVe siècle, mais il avait pour but, moins de préparer la Pâque, que de célébrer le jeûne du Seigneur au désert dans les semaines qui suivirent son baptême. C’est dans la seconde moitié du IVe siècle, en lien avec la préparation ultime des catéchumènes au baptême, qu’on vit apparaître le Carême. Initialement, celui-ci débutait le sixième dimanche avant Pâques, c’est-à-dire quarante jours exactement avant le Triduum pascal. Au VIe siècle, voulant assurer quarante jours de jeûne effectif, et le dimanche échappant à cette pratique, on fit commencer le Carême le mercredi précédent. Mais la liturgie garde encore le souvenir du temps où le 1er dimanche de Carême introduisait les quarante jours de jeûne. La bénédiction solennelle de ce dimanche dit en effet :

  • « Aujourd’hui, vous entrez en Carême. Que l’Esprit de Dieu vous accompagne pendant ces quarante jours et vous rende forts contre le mal. Amen.
  • Le Christ a déjà remporté la victoire contre le Malin. Forts de sa présence, combattez avec lui pour participer à sa victoire. Amen.
  • Dans la prière, la pénitence et le partage, vous allez cheminer vers Pâques. Puissiez-vous, au terme de ce Carême, être plongés à nouveau dans la joie de votre baptême. Amen. »

Cette bénédiction résume parfaitement le sens du Carême l’Église nous fait vivre chaque année. Le jeûne a pour but de nous entraîner « au combat spirituel : que nos privations nous rendent plus forts pour lutter contre l’esprit du mal. » [2] Il s’agit d’apprendre « à résister au péché, pour célébrer d’un cœur pur le mystère pascal, et parvenir enfin à la Pâque éternelle » [3], de « progresser dans la connaissance de Jésus Christ et de nous ouvrir à sa lumière par une vie de plus en plus fidèle. » [4]  

Comme le rappelle l’évangile du mercredi des cendres, le jeûne est inséparable de la prière et de l’aumône. Puissions-nous apprendre, en luttant contre l’assouvissement de nos appétits, à mourir au péché, à nous décentrer de nous-mêmes pour nous tourner davantage vers Dieu et notre prochain. Que ce Carême soit l’occasion pour nous d’être toujours plus fidèles à notre baptême, en passant avec le Christ de la mort au péché à la vie nouvelle des enfants de Dieu. Que le jour de Pâques, nous ne fêtions pas seulement la résurrection du Christ, mais aussi la nôtre !

[1] Littéralement : le quarantième (jour avant Pâques)
[2] Prière d’ouverture du mercredi des cendres.
[3] Préface du Ier dimanche de Carême.
[4] Prière d’ouverture du Ier dimanche de Carême.