Interpeller au diaconat : le diocèse de Rennes se mobilise

Interpeller au diaconatLe diocèse de Rennes vient d’éditer un petit guide pour inciter les prêtres, les responsables de Service ou de Mouvement, à interpeller au diaconat permanent. Ces hommes, mariés ou non, sont ordonnés à vie et mènent de front vie familiale, vie professionnelle et ministère dans l’Eglise diocésaine. Qui sont-ils ? Vincent Massart, diacre permanent et délégué diocésain adjoint pour le diaconat, réponds à nos questions.

N’y a-t-il pas la tentation de voir le diacre permanent comme un remplaçant du prêtre ?

Le défi du diaconat permanent est de rester constamment à sa juste place, entre deux tendances humaines : prendre la place (parfois inconsciemment) du pasteur qui mène la communauté, ou agir comme un « super laïc » hyperactif en oubliant d’être une présence spirituelle et sacramentelle.

L’agrandissement actuel des paroisses dans notre diocèse est une évolution parallèle à la diminution du nombre des prêtres en exercice. Moins nombreux, les prêtres sont toujours plus sollicités et pourraient avoir tendance à recentrer leur mission plus spécifiquement sur l’animation de la vie pastorale, la préparation et la célébration des sacrements. Le risque serait de faire passer au 2e plan de la vie de l’Église la ‘diaconie’ de l’Église, et le service rendu aux plus pauvres, faute de temps.

Pourtant cette diaconie est non seulement une vieille tradition de l’Église, déjà évoquée dans les actes des apôtres, mais la diaconie, en tant que charité organisée en communauté d’Église, est indissociable de la prière, et de l’enseignement de la Parole de Dieu. Elle est même constitutive de l’Église et de la foi. De tout temps, les chrétiens ont visité les malades, les prisonniers, accueilli les pauvres, et accomplit toutes les œuvres de Miséricorde au nom du Christ. Le diacre est donc nécessaire à l’Église pour être signe visible et sacramentel de cette diaconie, dans le ministère ordonné. Non pas pour la réaliser à lui seul, mais pour signifier par sa présence qu’on peut rencontrer le Christ dans l’acte charitable.

Quelles missions reçoivent les diacres en Ille-et-Vilaine ?

Ordination diaconale Betrand Jardin
Ordination diaconale de Bertrand Jardin en février 2015 à la cathédrale de Rennes : il se présente à l’évêque, avec son épouse.

La mission du diacre, par essence, est une participation à cette diaconie au sens large. Si cette mission s’exerce souvent « au seuil » de l’Église, c’est-à-dire volontiers tournée vers les personnes qui ne font peu ou pas partie de la communauté chrétienne, ce service des plus fragiles peut se réaliser aussi, évidemment, au cœur de la communauté. Il s’agit alors soit d’exercer la charité au sein même de la paroisse, soit d’exprimer cette attention aux plus pauvres dans la préparation des sacrements, la célébration des baptêmes ou des mariages, la présidence de célébrations d’obsèques, la conduite d’un groupe de prière.

Les missions des diacres dans le diocèse sont donc très variées :

  • visiteurs de malades, et participation à la pastorale de la santé
  •  visiteurs ou équipes d’aumôneries dans les prisons, ou au centre de rétention administrative,
  • accompagnement des personnes à la rue, participation au Secours Catholique, au CCFD
  • présence aux migrants
  • participation à la préparation et célébration des sacrements
  • etc
Diacres_Retraite à Landevennec
Retraite des diacres du diocèse, et de leurs épouses, à Landevennec en mai 2016

Quelle est l’évolution du nombre de diacres dans le diocèse de Rennes ?

43 diacres sont actuellement en activité dans le diocèse de Rennes. C’est un nombre moyen par rapport aux autres diocèses, il y a des diocèses plus « riches », d’autres moins.  La première ordination au diaconat permanent dans notre diocèse date de 1982, il y a donc déjà 35 ans. La prochaine est prévue le 2 avril prochain.

En moyenne, chaque année nous donne la joie d’une ou deux ordinations au diaconat permanent pour le diocèse. On pourrait donc penser qu’il y a plus d’ordinations de diacres permanents que de prêtres, mais tout n’est pas aussi simple. En réalité, dans le diocèse de Rennes, entre 2010 et 2016, il y a eu 8 ordinations de prêtres, et 7 ordinations de diacres permanents.

De plus, les diacres permanents sont ordonnés beaucoup plus tardivement dans leur vie que les prêtres, si bien que leur «carrière » ou vie diaconale est évidemment plus courte. Enfin, les diacres sont souvent ordonnés pendant leur vie professionnelle, et ils ont une famille à charge, ce qui réduit d’autant le temps qu’ils peuvent mettre au service de leur mission d’Eglise. On doit cependant nuancer car la vie professionnelle d’un diacre est aussi un témoignage en acte de la vie diaconale.

Diacre
A Redon lors d’une Messe : le prêtre, l’évêque et le diacre (qui se reconnaît à son étole portée sur l’épaule gauche)

Quel est le défi posé par ce renouvellement moins rapide des diacres ?

La fraternité diaconale dans son ensemble vit actuellement la question de son vieillissement, avec une réduction de l’activité des diacres âgés tournés vers des missions plus locales, donc plus paroissiales. Dans une ambiance de réduction du nombre de prêtres, la présence plus visible des diacres âgés sur les paroisses semblerait justifier une mission plus pastorale, donc proche des prêtres, dans un soutien mutuel.

L’enjeu actuel, pour les diacres plus âgés, est de maintenir le signe de l’attention aux plus pauvres et aux plus fragiles, dans les missions de l’Église en paroisse. Il reste toujours nécessaire de faire signe que la triple diaconie de l’Église ne s’exprime pas seulement dans certains services particulièrement destiné à la charité, mais bien dans toute l’activité de l’Église.

Vincent Massart
Vincent Massart est médecin à Rennes. Il a été ordonné diacre permanent en 2006.

Le guide, que vous venez de publier, explique que le diaconat commence par un appel. De qui vient-il ?

Il est habituel de considérer que les diacres répondent à un appel qu’ils reçoivent de la part de l’Église elle-même. Cette interpellation concerne souvent un chrétien engagé, qui a été repéré et remarqué dans son activité par un responsable de l’Église, soit son curé, soit un prêtre avec lequel il travaille, soit éventuellement le responsable du service d’Église dans lequel il a des responsabilités.

Parfois, il arrive aussi qu’un chrétien se pose cette question de lui-même, et il aborde la question spontanément avec un prêtre responsable, en général son curé. Ensuite, la question est évoquée entre le candidat et son curé ou le responsable du service. Celui-ci en avise le bureau du diaconat, qui rencontre le candidat, et son épouse s’il est marié.

Quelle démarche est alors proposée pour se préparer au ministère de diacre ?

Le bureau diocésain du diaconat propose alors une démarche de discernement, suivi d’une formation théologique et spirituelle, dans un groupe diocésain, mais aussi un groupe d’accompagnement en paroisse. Le cheminement comporte une part d’« auto-discernement », par le candidat lui-même et son épouse, mais aussi un travail d’accompagnement par une équipe diocésaine pour répondre à toutes les questions qui peuvent surgir. La question fondamentale reste de savoir s’il est bon que ce candidat soit ordonné au diaconat permanent : est-ce bon pour lui, pour son épouse, et pour l’Église, en fonction de ses charismes, ses capacités, ses désirs et les besoins de l’Église.

Toute cette démarche doit absolument rester extrêmement discrète pour que le candidat puisse garder jusqu’au dernier moment la totale liberté de renoncer à la démarche sans devoir s’expliquer publiquement. Finalement, c’est l’évêque, en fin de démarche, qui appelle officiellement le candidat à être ordonné pour le diaconat permanent. Ce n’est qu’à ce moment-là que la démarche devient publique, alors qu’on n’est plus qu’à quelques mois de l’ordination après un cheminement de quatre ans environ.

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