De l’angoisse médiatique à l’espérance charismatique : Internet un chemin d’espérance

La paroisse Notre-Dame en Saint-Melaine de Rennes a rassemblé ces photos de ses paroissiens en tenue blanche avec la lumière de Pâques (extrait) afin de rendre visible sa communion malgré le confinement

L’Église aurait-elle fait sa conversion numérique, subitement depuis le confinement ? La réactivité des diocèses, des paroisses, des catholiques eux-même, pour innover dans cette situation extraordinaire est remarquable. Mais elle n’est pas sans poser des questions. Le père Nicolas Guillou, curé de paroisse à Rennes mais aussi Délégué Épiscopal à l’Information du diocèse de Rennes, a partagé cette réflexion à ses paroissiens.

Ce « Mot du curé » a été publié le 22 avril sur le site de la paroisse Notre-Dame de Bonne-Nouvelle

Le confinement dû au Covid19 nous a laissé dans la sidération. Chacun a eu à s’adapter et apprivoiser cette nouvelle situation, unique dans notre histoire contemporaine. Chacun restera chez soit pour se protéger d’un ennemi invisible qui fera dire à notre Président « Nous sommes en guerre ».

Les conséquences sont désastreuses. Les malades souffrent et meurent par milliers, laissant les soignants épuisés physiquement et psychiquement. L’économie est à l’arrêt et l’avenir devient très sombre. Le confinement est à apprivoiser rapidement par chacun, la vie ne devenant pas si simple sans liberté d’aller et venir. Les familles ne peuvent plus accompagner leurs proches dans leur fin de vie ou dans les EHPAD sanctuarisés. Les obsèques ont lieu dans le cimetière ou à la porte du crématorium. Nos églises accueillent de moins en moins de célébrations, pourtant il est toujours possible de vivre ce maillon essentiel pour le deuil.

Dans ce bouleversement de notre humanité, alors que l’on souhaiterait se tourner vers Dieu et sa miséricorde, les lieux de culte sont fermés et les offices interdits.

Prière composée par le groupe de jeune SMOS qui anime les messes pop-louage de la paroisse ND de Bonne-Nouvelle, désormais par vidéos interposées !

Une démultiplication des initiatives

En quelques jours les catholiques, prêtres et laïcs, vont s’organiser et permettre des centaines de messes sur les réseaux sociaux sans parler des messes de KTO et du Jour du Seigneur qui battent des records d’audience (Le Jour du Seigneur, avec plus de 2 millions de téléspectateurs, passe devant Téléfoot sur TF1 et Turbo sur M6, qui aurait cru voir ça un jour ?). Le plébiscite est considérable dans la communauté catholique en général.

> VOIR AUSSI : Émission en direct sur Facebook des Productions du Regard sur la place de la vidéo et des messes en direct

Cette démultiplication des initiatives de la présence de l’Église catholique sur internet étonne et enthousiasme la presse et nos contemporains : les catholiques existent bel et bien en fin de compte. Cet engagement fort de l’Église Catholique dans la transformation pastorale missionnaire, au travers de réseaux sociaux, permet de réconforter et de solidifier les communautés locales. Mais certains s’en attristent (Quel est ce nouveau cléricalisme ? cette « débauche » de messes et autres prières sur les réseaux sociaux comme Facebook ?).

Et pourtant, force est de reconnaître que les catholiques dans leur ensemble plébiscitent cette nouvelle présence virtuelle. Bien évidemment cela sera passager car, comme le rappelle le Pape François dans son homélie du 17 avril, cela est pour le moment nécessaire : « l’Église, les Sacrements, le peuple de Dieu sont concrets. Il est vrai qu’en ce moment nous devons vivre cette familiarité avec le Seigneur de cette façon, mais pour sortir du tunnel, pas pour y rester. »

Les 5 prêtres confinés des paroisses Notre-Dame d’Emeraude et St Guillaume de la Rance rivalisent d’humour pour inviter les paroissiens à des rendez-vous en live !

La « continuité pastorale »

L’expérience que nous vivons ensemble dans notre communauté locale de Notre Dame de Bonne Nouvelle à Rennes œuvre à la communion fraternelle. Elle permet ainsi la continuité de notre vie de communauté qui, bien que stoppée en réel par le virus, est encouragée par l’antivirus virtuel des réseaux sociaux. Les témoignages de joie et de merci sont nombreux et encourageants.

Ce lien au travers de la messe, l’adoration, la Lectio Divina et des enseignements par écrans interposés, contribue à poursuivre le compagnonnage qui se vivait naturellement dans nos paroisses et qui, après ce temps de pause virtuelle, rependra de plus belle sur le terrain de nos vies ecclésiales réelles. Nous apprenons ensemble à apprivoiser cet écran qui ne veut pas filtrer notre relation à Dieu mais, bien au contraire, nous proposer un chemin d’éducation à la relation du cœur à cœur avec notre Créateur.

> VOIR AUSSI la page Facebook de la paroisse qui répercute toutes les initiatives

Grâce à cela, nous entendons bien volontiers cette parole de Jésus « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom je suis au milieu d’eux ». Quelle bénédiction que d’en faire l’expérience bien modeste, alors que la quarantaine pourrait confiner notre vie spirituelle, allant jusqu’à risquer de tomber dans le gnosticisme et l’individualisme spirituels, comme le rappelle le Pape. Bien au contraire notre communauté n’a jamais été aussi prégnante et priante, avec des liens qui se créent de façon mystérieuse et très évangéliques. Vous êtes nombreux à en témoigner.

Après le virtuel nous entrerons dans le réel

Notre communauté vit actuellement une continuité dans sa mission au cœur du monde. Bien sûr, c’est imparfait car nous sommes faits pour le monde réel et nous sommes tous bien incarnés dans ce monde. J’en veux pour preuve toutes les souffrances que nous devons subir face cet ennemi invisible. C’est vrai, nos vies ne sont pas virtuelles, à la Netflix, ou stéréotypées, à la BFMTV, véritable virus d’angoisse et d’anxiété. Quelque part nous somme invités à un chemin pascal, grâce à cette forme de communication de notre monde, passant de la croix à la résurrection, de l’angoisse médiatique à l’espérance charismatique.

Comme baptisés et amis du Christ, sachons accueillir le souffle de l’Esprit dans ces 50 jours qui nous poussent vers la Pentecôte et, comme Nicodème, Il nous permettra de « renaitre de l’Esprit ». Après le virtuel imposé par un virus immatériel mais virulent, nous entrerons dans le réel, poussés par le souffle de l’Esprit, notre paraclet et notre bouclier, pour affronter un nouveau monde qui attend une Espérance que le Christ Ressuscité est venu offrir à tous sans exception.

Merci à tous ceux et celles, et en particulier aux jeunes de la paroisse, qui œuvrent sans compter à diffuser l’espérance et la foi, au travers des nouveaux moyens de communication ; c’est une véritable œuvre de charité.

Père Nicolas GUILLOU +