Parole de Mgr d’Ornellas : L’Europe, une « Vallée des saints »
La rentrée pastorale et scolaire est marquée par l’espérance. En effet, elle nous fait faire à tous un pas en avant. Pourquoi l’espérance ? Les JMJ et Cracovie ont été illuminées de figures de sainteté, issues de Pologne et d’autres nations. Et voici que j’ai béni la statue de saint Colomban à la « Vallée des Saints », à Carnoët, dans les Côtes d’Armor.
Paru dans Église en Ille-et-Vilaine n°278, septembre 2016 |
Il est curieux que ce lieu s’appelle « Vallée des Saints ». En effet, les soixante-treize statues qui y sont déjà érigées se dressent sur une colline d’où la vue splendide porte à la méditation. Mais le choix du mot « vallée » est judicieux. La vallée est si symbolique ! On y descend pour remonter ensuite vers un sommet où l’on désire aller. Nos vies et nos sociétés sont ainsi faites : sous le coup d’événements qui meurtrissent, nous descendons bien bas, parfois dans la désolation, la peur, voire l’angoisse. Il nous faut alors remonter la pente.
D’ailleurs, pour aller au Temple de Jérusalem, sur le mont Sion, il est nécessaire de franchir une vallée. Le Messie est venu par le Mont des Oliviers ; il est ensuite descendu au fond, dans la vallée ! Son âme « ressent frayeur et angoisse », est « triste à en mourir » (Marc 14,33-34). Habité par la confiance filiale en son Père, il lui remet son esprit (Luc 23,46). Mort, il est ressuscité ! Il est monté au ciel ! Oui, il est « descendu » – dans notre « vallée de larmes » selon le Salve Regina – pour « monter » (Éphésiens 4,9). Là où il est se trouve la « joie parfaite » (Jean 15,11).
Les saints ont eux aussi connu la descente dans la désolation, l’angoisse, et ils sont montés au ciel, « dans la joie de [leur] Seigneur » (Matthieu 25,21.23). Quelle fut leur sainteté ? L’espérance en Dieu, alors même qu’ils étaient faibles, au fond de la vallée. La Bible parle de la « vallée » comme « porte d’espérance » (Osée 2,17). Ce lieu à Carnoët porte bien son nom !
Robert Schuman a appelé le moine saint Colomban le « premier européen », à cause de ses voyages et de ce qu’il y a semé. Or, sur quoi les moines ont-ils bâti l’Europe ? Le pape François répond : « Au commencement, [le monachisme] favorisait la fuite du monde, essayant d’échapper à la décadence urbaine. […] Plus tard, saint Benoît de Nurcie a proposé que ses moines vivent en communauté, alliant la prière et la lecture au travail manuel (« Ora et labora »). Cette introduction du travail manuel, imprégné de sens spirituel, était révolutionnaire. On a appris à chercher la maturation et la sanctification dans la compénétration du recueillement et du travail. » (Laudato Si’, N. 126) J’ai partagé cette décision « révolutionnaire » aux agriculteurs réunis à Saint-Brieuc-des-Iffs ce 20 août dernier (texte de la conférence) .
De Cracovie à Carnoët, l’Europe est une « vallée des saints ». Combien ne sont-ils pas fils ou filles d’une de ses nations ! Ils lui ont légué l’harmonie entre travail et présence de Dieu, labeur et amour des pauvres, action et contemplation qui enflamme de charité. Voilà le beau travail grâce auquel chacun, avec sa famille, devrait simplement, avec joie, gagner sa vie.
Bonne rentrée avec votre espérance en Dieu pour la partager !