Homélie centenaire Marcel Callo

Les offrandes
Les offrandes

Le 5 décembre 2021, à la Cathédrale Saint-Pierre de Rennes, à l’occasion du Centenaire de la naissance du Bienheureux Marcel Callo.

Revoir la messe du Centenaire :

  • Livre du prophète Baruc  (5, 1-9)
  • Psaume 125
  • Lettre de saint Paul apôtre aux Philippiens (1, 4-6.8-11)
  • Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc (3, 1-6)

Mes amis,

Nous l’avons tous entendu, en ce deuxième dimanche de l’Avent, le Prophète clame : « Quitte ta robe de tristesse ». C’est la grande acclamation du Prophète, sa grande demande : « Quitte ta robe de tristesse ». (Baruc 5, 1).

Procession des offrandes - Portrait de Marcel par les Scouts
Procession des offrandes - Portrait de Marcel par les Scouts

Tristesse et consolation

En entendant cette phrase, je pensais à Marcel et à sa tristesse quand il a dû partir en Allemagne pour le Service du Travail Obligatoire. Quelle tristesse n’a-t-il pas ressentie d’être séparé de sa famille, et aussi de sa chère fiancée ! Il note dans ses lettres sa tristesse de voir « la misère et la détresse morale » de ceux avec qui il vit au Service du Travail Obligatoire. Cette « tristesse » le fait aussi pleurer. Il a du mal à « refouler les larmes » et « sa voix s’étrangle dans sa gorge » lorsqu’il participe à la « Messe de Requiem » de camarades décédés au cours de ce travail en Allemagne, car cette Messe de Requiem lui fait penser à la Messe de Requiem pour sa sœur Marie-Madeleine qui a été célébrée dans cette Cathédrale, juste avant qu’il parte en Allemagne. Oui, Marcel Callo a connu, comme il le confie lui-même, les « assauts » – parfois « violents » – sur le moral.

Voilà que le Christ s’approchait de lui à chaque fois. Jésus pouvait lui dire dans le fond de son cœur : « Marcel, quitte ta robe de tristesse. Revêt la parure de la Gloire de Dieu. » Cette Gloire de Dieu, ce n’est pas autre chose que l’Amour. Dans les lettres, on voit Marcel qui est ressaisi, consolé et qui, avec le Christ, va se mettre au service de ses frères. Il prépare le chemin pour que ses frères qui sont présents avec lui en Allemagne trouvent le Christ, aillent à la Messe. Un peu comme Jean-Baptiste qui, « dans le désert » (cf. Luc 3, 2), essaie de frayer une voie pour que le Christ soit connu. Dieu sait si Marcel a été consolé par le Christ de sa tristesse !

Quand on parcourt ses lettres, on est impressionné de voir à quel point, comme nous tous, avec un cœur aimant et un cœur aimé, il souffre de la séparation. Une de ses tristesses sera de ne pas être à l’Ordination de son frère Jean qui sera ordonné prêtre, de ne pas être présent à sa première grande Messe, de ne pas être présent à ce moment-là où il aurait dû célébrer les fiançailles avec sa chère Marguerite. Quelle tristesse pour Marcel ! Et voilà qu’à chaque fois, quand il parle de sa tristesse vient le Christ qui l’a consolé. « J’avais reçu le Christ et il m’a consolé… Sans Lui je ne sais ce que je deviendrais. »

Concert du groupe Hopen à St Melaine pour les 500 jeunes

Prière et joie

Marcel, c’est aussi celui qui prie, comme en témoignent ses lettres. Éloigné des siens, nous pouvons dire que cette phrase de saint Paul est devenue la phrase de Marcel : « Frère, à tout moment chaque fois que je prie pour vous tous. » (Philippiens 1, 4) Vous tous, sa famille ; vous tous, sa fiancée, la maman de sa fiancée ainsi que son père qui est décédé ! Voilà que Marcel se met en prière et il va offrir une Messe. À la Messe, il ne pense pas à lui mais il prie pour les siens. Pour la fête des mères, Marcel va à la Messe pour sa maman. Ou encore cette prière pour son frère Jean afin qu’il soit un saint prêtre.

Oui, cette phrase de saint Paul s’applique magnifiquement à Marcel : « Frères à tout moment chaque fois que je prie pour vous tous, c’est avec joie que je le fais. » Plusieurs fois, Marcel va parler de sa joie qui est en contraste avec sa tristesse, avec son désespoir d’être « seul », éloigné de ceux qu’il aime. Le Christ lui donne la joie, joie de recevoir des lettres de sa fiancée, de ses parents, joie quand il peut aller à la Messe. Quelle joie n’a-t-il pas trouvée dans l’Eucharistie où il rencontrait le Christ vraiment de toute la profondeur de sa foi ! Le voilà notre Marcel !

Ce Marcel, c’est aussi celui qui a une haute idée de sa mission. Non pas qu’il pense avoir une mission particulière, mais comme naturellement, il puise dans ce qu’il a appris à la Croisade eucharistique, dans le Scoutisme puis à la Jeunesse Ouvrière Chrétienne (JOC). Ce qu’il a appris, il va non seulement le promouvoir, l’enseigner, mais surtout le vivre.

Marcel et ses 11 compagnons de prison
Marcel et ses 11 compagnons de prison

Un amour et une fraternité vécue

Voici ce qu’il dit dans une veillée à Rennes sans savoir qu’il allait partir pour le STO en Allemagne : « Nous voulons vivre de cette fraternité qui animait les premiers chrétiens. Nous continuons leurs œuvres. Nous avons leur foi, leur dynamisme. Comme eux, nous devons être les premiers apôtres dans nos milieux de vie. Comme eux, nous sommes aidés par le Christ qui nous comble de ses grâces. Comme eux, nous serons les piliers de la société nouvelle. » Voilà que Marcel se réfère aux premiers chrétiens. Que connait-il des premiers chrétiens dans ce qu’il a appris dans l’Eucharistie, au scoutisme et dans la JOC ? Il a appris cette fraternité au nom de Jésus. Si Jésus nous rassemble, c’est pour que nous soyons frères et sœurs les uns des autres, quelle que soit notre histoire ou notre condition sociale.

Nous venons d’entendre son affirmation : « Nous voulons. » Voilà le désir de Marcel qu’il présente à tous les jocistes ! « Nous voulons vivre de cette fraternité qui animait les premiers chrétiens. Nous continuons leurs œuvres. » Voilà qu’aujourd’hui, Marcel, qui est présent au milieu de nous, nous dit à chacun d’entre nous aujourd’hui, au XXIème siècle : « Nous chrétiens, nous continuons l’œuvre des premiers chrétiens. » Et comment ? Nous avons leur foi, leur dynamisme. Nous devons être les premiers apôtres dans nos milieux de vie. Qu’ajoute-t-il ? « Nous sommes aidés par le Christ qui nous comble de ses grâces. » Rien n’est possible sans le Christ, comme rien n’était possible aux premiers chrétiens sans le Christ.

C’était une veillée, un soir. La guerre avait débuté depuis le 1er septembre 1939. Voici ce qu’ajoute Marcel : « Ce soir, dans les temps difficiles que nous traversons – chacun d’entre nous peut peut-être voir qu’il y a des temps difficiles dans sa vie –, cette veillée va nous remettre dans l’atmosphère de cette époque si troublée que vit le début du christianisme, dans cette communauté si forte que nous, jocistes nous continuons. » Appliquons cela à chacun de nous dans cette communauté si forte que nous – jocistes, scouts, mejistes, apprentis d’Auteuil, jeunes, adultes – formons, nous continuons l’œuvre des premiers disciples, des premiers chrétiens. Alors, Marcel ajoute : « Essayons de nous pénétrer de la charité qui les animait – ces premiers chrétiens – ressentons entre nous cette communion d’idéal. Pénétrons-nous du grand Amour qui les animait quand ils se réunissaient au nom du Seigneur Jésus. »

Mes amis, quelle chance nous avons de connaitre Marcel, d’apprendre à le connaitre, de le laisser nous parler, de le prier pour qu’il intercède pour nous ! Nous pourrions tout simplement demander aujourd’hui à l’occasion du 100ème anniversaire de sa naissance : « Cher Marcel, toi qui es vivant au Ciel, redis-nous ce que tu as dit à tes camarades jocistes quand tu avais 19/20 ans ; redis-nous que nous avons à essayer de nous laisser pénétrer de cette charité des premiers disciples ; redis-nous que nous avons à apprendre à vivre de ce grand Amour qui animait les premiers disciples quand ils se réunissaient autour du Maître. »

Messe centenaire - Statue Marcel Callo
Statue de Marcel Callo apportée par les Orphelins Apprentis d'Auteuil

Un jeune saint

Je peux maintenant laisser parler le pape François quand il évoque ces jeunes saints qui illuminent l’Église, le monde. Écoutez ce que dit le Pape juste avant de nommer Marcel Callo comme un exemple pour tous les jeunes du monde entier : « Le cœur de l’Église, – et le cœur de l’Église à Rennes, dans l’Oise, le cœur de l’Église dans beaucoup de lieux en France, à Francfort, à Erfurt, à Paderborn, à Linz, à Koudougou au Burkina-Faso, à Abidjan en Côte d’Ivoire – est riche de jeunes saints qui ont offert leur vie pour le Christ et pour beaucoup en allant jusqu’au martyr. (Voilà Marcel qui est allé jusqu’au martyr !) Ils ont été de précieux reflets du Christ jeune qui brille pour nous stimuler et pour nous sortir du sommeil. À travers la sainteté des jeunes, l’Église peut relancer son ardeur spirituelle et sa vigueur apostolique, c’est-à-dire la vigueur de son témoignage. Le baume de la sainteté engendré par la beauté de la vie de tant de jeunes peut soigner les blessures de l’Église et du monde en nous ramenant à la plénitude de l’amour à laquelle nous sommes appelés depuis toujours. Les jeunes saints nous poussent à revenir à notre premier amour. » (Christus Vivit, 49-50).

Mes amis, nous pouvons rendre grâce à Dieu de nous avoir donné le jeune Marcel qui illumine nos vies par son amour jusqu’au don total, son amour jusqu’à l’épuisement, son amour d’une pureté extraordinaire, son amour qui a transparu dans son dernier regard juste avant sa mort. Le médecin qui était là dans le camp de Mauthausen a pu témoigner qu’il y avait « quelque chose d’extraordinaire » dans ce regard, un regard « d’espérance ». « J’ai vu, dit-il, le regard d’un saint. » Que voyait Marcel ? Peut-être l’espérance que le Christ continue à construire la fraternité où nous nous aimons en vérité les uns les autres, selon la grâce du Seigneur Jésus, selon la grâce de l’Évangile.

Mes amis, soyons fidèles au message de Marcel Callo aujourd’hui et demandons-lui qu’il nous aide du haut du ciel à remplir notre cœur de charité, d’amour et d’espérance afin que nous puissions considérer tout homme, comme il le dit lui-même, comme un frère, comme une sœur qui mérite notre amour, notre délicatesse, que nous nous engagions à son service et que nous puissions faire triompher la joie de croire en Jésus, la joie d’être avec Jésus, la joie de travailler à cette fraternité, la joie d’être consolés et accompagnés chaque jour par le Christ.

Messe centenaire - Orchestre inter-mouvement
Messe centenaire - Orchestre inter-mouvement

Quelle promesse faire au Christ ?

Voici Marcel Callo, un jeune qui, en pédagogue, nous parle avec beaucoup d’affection. Une fois que nous avons entendu tout cela, une fois qu’il nous a enseignés sur Jésus, Marcel Callo, âgé de 20 ans, termine : « Sur quel point tout cela va-t-il modifier ma façon de penser, de prier, ma façon d’être apôtre, de travailler, de passer mes loisirs ? » Il ajoute cette dernière question que nous pouvons tous entendre et qu’il dit à chacun d’entre nous : « Qu’ai-je à promettre au Christ pour l’avenir, qu’ai-je à changer dans ma vie, qu’est-ce que je vais y ajouter ? » Cher Marcel, toi qui es bienheureux au Ciel, prie pour moi, prie pour nous tous, aide-moi à trouver au fond de mon cœur quelle promesse je vais faire au Christ pour l’avenir de ma vie. Amen.

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