La place de Benoît XVI dans l’élaboration du Catéchisme de l’Eglise Catholique

Le pape émérite Benoit XVI est décédé le 31 décembre 2022, l’occasion de revenir sur le rôle important qu’il a eu dans la rédaction du « Catéchisme de l’Eglise catholique » paru en 1992 durant le pontificat du pape Jean-Paul II. C’est grâce à l’inspiration et à la direction de Joseph Ratzinger que cette œuvre, destinée à devenir un point de référence sûr pour la foi à notre époque, verra le jour. Le cardinal archevêque de Vienne Christoph Schönborn évoque ses souvenirs.

Par Christoph Schönborn*

Le Catéchisme de l’Église catholique figure assurément parmi les grands héritages du pape Benoît XVI figure. Avec gratitude, ici, j’évoque des souvenirs personnels avec lui. Il est bien connu que Vatican II, à la différence du Concile de Trente, n’avait pas décidé de publier un catéchisme propre au Concile. Les documents du Concile ont, en quelque sorte, été eux-mêmes la grande catéchèse de l’Église. Vingt ans après le Concile, beaucoup ont commencé à voir les choses différemment. Le synode des évêques de 1985, parmi ses propositions, en a formulé une qui exhortait le pape à rédiger un catéchisme de Vatican II. On parlait alors de compendium, on évitait l’expression catéchisme, c’était mal perçu. La désorientation ressentie de toutes parts dans la période post-conciliaire avait été décisive pour la formulation des souhaits des pères synodaux. Une conférence que le cardinal Ratzinger avait donnée à Lyon et à Paris sur la «crise de la catéchèse» avait joué un rôle important. Cette conférence a eu une résonance mondiale.

Le cardinal Ratzinger n’a pas seulement abordé le sujet de la crise de la proclamation de la foi, mais il a également présenté un programme pour le renouvellement de la catéchèse de l’Église. Sa référence avait été le Catéchisme romain de 1566 et son souci était de présenter la foi de l’Église dans toute sa beauté et de manière non polémique. Il est en effet étonnant qu’à une époque marquée par la controverse théologique, l’Église ait présenté un exposé de la foi qui renonçait totalement à la polémique, s’appuyant pleinement sur la puissance rayonnante de la représentation positive de la foi.

Les conférences de Joseph Ratzinger à Lyon et à Paris ont sans doute été une impulsion forte qui a encouragé les pères synodaux à demander au Pape Jean-Paul II de réfléchir à quelque chose de similaire pour notre époque.

En 1986, Jean Paul II commença à mettre en œuvre la demande du Synode. Personne n’a été surpris qu’il confie au cardinal Ratzinger la direction de ce projet. Je n’ai certainement pas besoin de rappeler les étapes de ce cheminement de six ans. Une commission de 12 cardinaux et évêques fut formée, avec le cardinal Ratzinger à sa tête. Un comité de rédaction a été créé, composé de sept évêques diocésains; en tant que professeur à Fribourg, j’ai eu l’honneur d’en être le secrétaire.

Il me semble important de souligner le rôle du Cardinal Ratzinger dans la réalisation de cette œuvre. Ses conseils, son esprit, son inspiration ont été décisifs. La première chose, et la plus importante, est qu’il a cru en ce projet. Dès le premier jour, il y a eu une grande controverse concernant le caractère raisonnable, voire la faisabilité d’un recueil de la foi valable pour le monde entier. La pluralité des cultures et des croyances religieuses semblait s’y opposer radicalement. Au contraire, il a cru à la possibilité, avec confiance et courage, que l’unité dans la foi rende également possible l’expression commune de cette unité. C’est avec cette hypothèse directrice que le travail a commencé. Il a offert un second élément utile à la réalisation du projet: la conviction que les quatre piliers de la catéchèse sont également fondamentaux pour aujourd’hui. Il en a également indiqué l’ordre de succession: le Credo est le fondement, depuis les premiers temps de l’Église; les sacrements sont les portes par lesquelles la grâce entre dans nos vies; les dix commandements sont les points de référence sûrs d’une vie heureuse; le Notre Père représente la mesure et la forme originales de toutes nos prières. La structure du livre de la foi était prête.

La troisième indication a été déterminante pour le style de l’œuvre. En effet, il ne s’agissait pas de reproposer les débats théologiques, ni de poursuivre les discussions. Sa tâche était de présenter la doctrine de la foi de la manière la plus simple et la plus claire. Le Catéchisme ne devait pas prendre parti entre les écoles théologiques, mais offrir tout ce qui précède toute théologie et qui est la base de toute théologie: le depositum fidei. Le cardinal Joseph Ratzinger s’est particulièrement attaché à considérer la doctrine de la foi comme un tout organique, à prêter attention au nexus mysteriorum, à la connexion interieure de chaque doctrine de la foi, à sa symphonie. Le catéchisme ne devait pas devenir une structure doctrinale sèche et abstraite, mais devait révéler quelque chose de la beauté de la foi. Sous sa direction, son encouragement constant et sa paternité spirituelle, l’œuvre s’est développée pour devenir ce qu’elle est devenue par la suite avec sa promulgation par le Pape Jean-Paul II: un critère et un point de référence sûr pour la foi de notre temps. Le Catéchisme reste un grand témoignage du pouvoir formateur du théologien Joseph Ratzinger, le Pape Benoît.

 * Cardinal archevêque de Vienne

31 décembre 2022

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Voilà également un lien vers un article du SNCC : Mort du pape émérite Benoît XVI : la catéchèse durant son pontificat