Homélie 25 août 2019 – 21ème dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Père Alain Ferré

Curé de la paroisse Saint-Jean XXIII de Rennes (35)

Évangile : «On viendra de l’orient et de l’occident prendre place au festin dans le royaume de Dieu» (Lc 13, 22-30)

« Bousculez-vous au portillon ! » : c’est la consigne que le Christ semble nous donner dans cet Évangile : « Hâtez-vous de rentrer, car la porte est étroite et le temps est compté ! »… Décidément, dans tous les Évangiles de ces dimanches, Jésus ne cesse de nous donner des consignes en fonction de son retour, en fonction de ce jour où, comme il le disait à ses Apôtres, nous ayant préparé une place, il viendra nous chercher, en fonction du jour de notre mort : « Songez plus à vous enrichir aux yeux de Dieu qu’à vous enrichir sur cette terre ! »  – « Attachez vos ceintures, soyez constamment en tenue de travail, en tenue de service, soyez toujours prêts à servir le Maître et vos frères»… Voilà ce que Jésus nous disait les dimanches précédents – Et aujourd’hui : « Hâtez-vous, faites effort ! La porte est étroite, il n’y a pas de passe-droit, de tickets d’entrée achetés à prix d’or ! »

Ces paroles nous semblent dures, et pour les comprendre il faut aller consulter Jésus lui-même. N’a-t-il pas dit : «Je suis la porte : si quelqu’un entre par moi, il sera sauvé». La porte est Jésus lui-même, et le don de tout son amour. La porte étroite, c’est l’image de Jésus lui-même qui va vers sa passion, qui donne sa vie par amour.

Et le Royaume des cieux dont parle Jésus n’est pas un lieu, il est la «vie éternelle», il est la Jérusalem nouvelle vers laquelle nous marchons. Et le chemin est souvent dur et exigeant. Il faut y mettre le prix. C’est pourquoi Jésus nous avertit : on n’entre pas « comme ça », tout de go, dans ce bonheur éternel ; il faut faire des efforts, il faut être acteur de notre salut. Et on ne peut compter sur aucun privilège, sur aucun passe-droit. On ne peut pas se contenter de dire : « Mais Seigneur, ne sommes-nous pas des chrétiens ? n’avons-nous pas été baptisés ? ne nous sommes-nous pas assis à ta table sainte ? ne sommes-nous pas des pratiquants ? et même, nous, tes prêtres ?… »Et le Seigneur nous répondra : « Avez-vous fait des efforts pour entrer par la porte étroite ? vous êtes-vous hâtés, pressés, pour accueillir mon amour et en vivre vraiment ?… si non, je ne vous connais pas ! » Et d’autres, qui avaient l’air bien loin du Royaume, nous passeront « sous le nez » ! « Il y a des premiers qui seront les derniers, – et des derniers qui seront les premiers ! » Car, ce qui compte aux yeux du Seigneur, ce sont les actes, les efforts ! c’est la répercussion sur notre vie que doit avoir normalement notre foi et notre pratique. Une fois de plus, nous voici bien avertis.

C’est vrai, ON NE SE BOUSCULE PAS AU PORTILLON, à la porte !

Nous aimerions que nos communautés soient plus nombreuses… Et tous ceux qui ne sont pas là nous manquent… Nous aimerions être plus nombreux à comprendre qu’à chaque eucharistie c’est vraiment le corps et le sang du Christ que nous recevons, sa vie livrée, pour qu’à notre tour notre vie soit un peu plus donnée.

Nous devrions être plus nombreux à pratiquer une charité qui soit réelle et qui n’exclut pas la vérité…  à avoir ce souci de justice que le Christ a tellement recommandé… à prendre au sérieux un engagement, une parole donnée…

Oui, vraiment nous sommes appelés par le Christ à être chrétiens authentiques.

C’est vrai, nous avons souvent l’impression d’être le petit nombre, le petit reste, mais «le petit reste fidèle» dont la Bible parle souvent. Et c’est par ce petit reste que Dieu relance à nouveau le monde sur le chemin de l’amour et de la confiance.

C’était déjà le cas au temps de Noé le « rescapé », qui va maintenir la croyance au vrai Dieu sur la terre… C’était vrai au temps d’Abraham qui était à peu près le seul dans son pays à reconnaître le vrai Dieu… Et tout au long de l’histoire du Peuple de Dieu, c’est ce « petit reste fidèle » qui continuera ce travail d’apporter au monde le véritable idéal de l’amour de Dieu et des frères, et des plus petits en particulier.

Pour Jésus, ce sera pareil. C’est avec un tout petit nombre qu’Il commencera son œuvre d’évangélisation : douze pauvres types pour transformer le monde entier !…

Alors, aujourd’hui, quels seront ceux qui pourront, dans notre monde tel qu’il est, redonner une âme, redonner un idéal, et remettre un peu de beauté ?... C’est nous, mes frères, qui avons cette charge et cette responsabilité, si peu nombreux que nous soyons… nous avons cette responsabilité de porter à la face du monde ce témoignage de la beauté et de la grandeur du Seigneur, de la joie et de l’enthousiasme que peut susciter cet idéal. C’est là notre rôle !

Dans la mesure où nous serons des témoins authentiques, des gens emballés par cette beauté, cette grandeur du Seigneur, de son amour, dans la mesure où l’on sentira que cet idéal nous possède… dans cette mesure, nous pourrons ramener au Seigneur des frères qui ne le connaissent pas encore. Ce sera la réalisation de cette prophétie d’Isaïe, dont nous parlait la première lecture.

Alors, frères et sœurs, que cette perspective nous stimule à faire les efforts que Dieu nous demande pour entrer dans ce Royaume, à les faire sans plus tarder, car nous ne savons pas quand la porte se fermera… Et finalement, une seule chose est importante : dégager les voies d’accès à la porte, car on n’entre pas dans le royaume alourdi par tout ce qui, habituellement, nous distrait de l’essentiel. La porte est étroite, parce que l’amour de Dieu pour nous suffit. Tout le reste est encombrement.

Amen