« Espérer contre toute espérance » (Romains, 4,18)

Dans ces moments difficiles nous sommes conviés à l’espérance. Ce n’est pas à un petit espoir mais une attitude ; elle nous vient d’Abraham : « Espérant contre toute espérance, il crut et il devint père d’un grand nombre de nations ». Le voyage, Abraham ne l’a pas fait en avion (…), mais pendant des mois et des années (de confinement) pardon….d’exode dans le désert. Dans son découragement, Dieu le  conduisit dehors et dit : « Lève les yeux au ciel et dénombre les étoiles si tu peux les dénombrer. » Et il lui dit : « Telle sera ta descendance. » Et Abraham crut une autre fois au Seigneur, « qui le lui compta comme justice » (Gn 15, 2-6).

La scène se déroule de nuit, dehors il fait nuit, mais aussi dans le cœur d’Abraham il fait sombre, c’est l’obscurité de la déception, du découragement, de la difficulté à continuer à espérer en quelque chose d’impossible. Désormais, le patriarche est trop vieux, il lui semble ne plus avoir de temps pour un fils. Abraham s’adresse au Seigneur, mais Dieu, même s’il est là, présent, et qu’il lui parle, semble désormais s’éloigner, comme s’il n’avait pas respecté sa parole. Abraham se sent seul, il est vieux et fatigué, la mort pèse. Comment continuer à se fier ?

Et l’espérance, c’est aussi ne pas avoir peur de voir la réalité pour ce qu’elle est et en accepter les contradictions.

Alors, Abraham, dans sa foi, s’adresse à Dieu pour qu’il l’aide à continuer à espérer. C’est curieux, il ne demanda pas un enfant, mais dit : “Aide-moi à continuer à espérer”, la prière d’avoir l’espérance. (Pape François 28 décembre 2016).

C’est notre prière…dans l’exode de  notre confinement…. Et si la nuit et le temps  (nuages) le permet, ….comptez les étoiles… comme Abraham. C’est une belle expérience de foi.

Un des premiers risques de ces moments difficiles est la division entrainée par l’inquiétude. Ce deuxième confinement est plus dur, le petit espoir de l’été s’est envolé.  C’est le propre de tout virus : « circuler ». Mais son invasion est longue. Combien de temps ? 1 mois… tout l’hiver… Avec des allers retours localisés ou généralisés plus longtemps.  La difficulté qui dure peut entrainer l’incompréhension, saper la confiance dans l’autre :  le dirigeant, la médecine, un sentiment d’incohérence ou de persécution, de complot : « le virus chinois », ou tout simplement aversion de l’autre le voisin qui ne comprend rien et ne fait pas attention. Cela peut même entrainer une division spirituelle sur la messe et pas de messe. La communion en « drive » ou non.  La messe en ligne et non en ligne. Division sur : « tel ou tel prêtre fait comme cela. Le nôtre ne fait rien….Ah, si nous avions tel évêque ». Ou « c’est grâce à nous Civitas que vous avez retrouvé la messe…Ou encore « si on était dans tel pays… »

Un autre risque lorsque la difficulté persiste, c’est le découragement.  Il y a des fractures fortes entre confinement en campagne ou confinement dans un appartement exigu : distance ou écrasement. Parents que l’on peut visiter ou non, car enfermés dans un Ehpad. Découragement dans son métier de soignants à bout de force ou appelés à  venir travailler même contaminés. Magasins fermés au nom de la « non circulation du virus » alors que l’autre  plus bondé est ouvert…. Promotions alléchantes sur internet….Ce sentiment d’injustice aggrave le découragement. De là, peut survenir la désespérance… Chez des malades non visités, ce peut-être  la détresse absolue…. Les soignants qui veulent abandonner le métier. On se laisser couler ! Même, la violence familiale ou infantile semble déborder (multipliée par 15 !!! !)

Que devons-nous vivre en Eglise ?  « N’ayez pas peur petit troupeau, j’ai vaincu le monde (Jean 16,33)  « je suis toujours avec vous » Mt 28,20. Comment  se manifeste cette présence du Seigneur et notre fidélité à travers ce que nous pouvons vivre en Eglise ?

Les lieux de culte sont ouverts. Nous pouvons y aller. Nous pouvons y prier. Nous pouvons adorer le Seigneur. Le Christ « est toujours avec nous ». Nous pouvons prier en silence à plusieurs. Nous pouvons prier le chapelet. Nous pouvons nous donner rendez-vous à quelques-uns… dans notre heure de sortie. Le presbytère est ouvert. Vos prêtres sont là.

Les prêtres assurent la prière de l’eucharistie. A l’église ou dans une chapelle en absence de paroissiens  (à 18h30 en semaine, aux heures habituelles  (18h00, 11h00) le week-end. Ou chez eux pour certains.  Ils offrent dans leur cœur, dans la peine du silence  l’offrande du Christ pour le Salut du monde. Ils portent les intentions particulières qui leur sont confiées…. Des époques et des pays entiers ont vécu l’interdit des prêtres de célébrer en public.

Nous pouvons tous prier chez nous. Veiller. Nous avons des revues : « prier », « magnificat », etc… Lisons les en silence ou à haute voix. Entrer dans la prière du jour. Lire savoureusement un passage de la Bible. Entrer dans la prière de l’Eglise le bréviaire. Prier en famille : raconter ce qu’on a fait, vu, aimé. C’est la relecture… chanter un chant. Proclamer une prière. Porter une intention.

Nous pouvons offrir l’absence, le manque. C’est le sacrifice spirituel. C’est peut être le plus important : Demeurez en moi…. Constamment. Sans cesse. A chaque instant…Dans la moindre respiration.

Avec la durée difficile de cette pandémie,  nous allons mettre en place avec vous tout ce qu’appelle cette situation exceptionnelle : messe filmée, communion, prière commune, etc… Dans cette difficulté le Seigneur nous appelle à « Espérez contre toute espérance ! ». C’est la foi d’Abraham qu’il nous invite à vivre .

Père Jean