Homélie du 11 février 2022 pour la Journée de Lourdes par Mgr HEROUARD

La semaine du 11 Février se déroulait à Lourdes la semaine de Lourdes. Une messe internationale a réuni dans la basilique souterraine un nombre important de Pèlerins avant la réouverture au public de la Grotte de Massabielle. Grande fête à Lourdes !

« Chers amis…frères et sœurs,

C’est jour de fête, aujourd’hui, ici à Lourdes en cette date  anniversaire de la première apparition de Marie à Bernadette ; jour de fête pour toute la communauté du sanctuaire, pour tous ceux qui sont ici à Lourdes et qui se consacrent à l’accueil des pèlerins, à l’accueil de tous ceux qui viennent à la suite de Bernadette vers la grotte de Massabielle pour confier à Marie l’Immaculée Conception , Celle qui s’est révélée petit à petit à Bernadette, leur vie, leurs joies , leurs espérances, leurs tristesses, les difficultés que chacun peut connaître devant la maladie, le handicap, la solitude, le grand âge, mais aussi devant les divisions, les mésententes, bref tout ce qui nous pèse ou parfois nous accable. C’est jour de fête parce que à la suite de Bernadette les pèlerins viennent ici à Lourdes depuis 1858 pour manifester leur confiance, leur espérance, pour grandir dans la foi et repartir plus en paix, dans la joie d’une fraternité  simple vécue au quotidien pendant les quelques jours de pèlerinage.

C’est la fête, aujourd’hui, pour les chapelains qui sont auprès de la grotte et accueillent les pèlerins du monde entier dans toute les langues, ces pèlerins qui viennent ici pour chercher la guérison des corps et des cœurs, pour vivre l’expérience simple des gestes qui accompagnent le pèlerinage : le rocher à la grotte, l’eau qui lave et désaltère, la lumière qui brille et exprime la prière du pèlerin ; jour de fête pour tous ceux qui travaillent dans ce sanctuaire et qui se donnent souvent de façon humble et cachée pour que les choses se passent le mieux possible ; jour de fête pour tous ceux qui participent à ces journées de Lourdes, directeurs des pèlerinages, responsables d’hospitalités qui viennent mettre en œuvre, penser, organiser les pèlerinages à venir ; jour de fête pour tous ceux qui sont venus spécialement aujourd’hui, familiers du sanctuaire, ou parfois venus de très loin et qui veulent aujourd’hui honorer particulièrement Marie, Mère de Dieu, Mère des hommes, Mère de l’Eglise.

Depuis deux ans, le monde entier a connu l’épreuve de la pandémie et de toutes ses conséquences, la maladie, la mort, la mise à distance, l’impossibilité pour beaucoup de venir malgré leur désir jusqu’à Lourdes, les liens tissés à travers  les retransmissions télévisées, à travers Internet ou en Visio sur le site de Lourdes ou Kto et qui ont permis de porter le message de Lourdes jusque dans les différents diocèses ; mais aujourd’hui, ne soyons pas triste, nous avons la belle Espérance que beaucoup de pèlerins pourront envisager voyager jusqu’à Lourdes, en particulier, les petits, les malades, les blessés de la vie, les pauvres. Oui, la démarche du pèlerinage est faite d’abord pour eux et nous n’avons pas le droit de les en priver en nous cachant derrière des précautions parfois excessives ou poussées à l’extrême.

Cette fête de Notre-Dame de Lourdes de 2022 peut être encore comme un nouveau départ, un nouvel élan, une joie et une Espérance à partager. Le thème qui a été choisi et qui va se dérouler sur trois ans « allez dire aux prêtres que l’on bâtisse ici une chapelle et que l’on y vienne en procession » vient de nous remettre au cœur de la démarche du pèlerinage. Elle relie étroitement la rencontre de Marie et de Bernadette : l’expérience et l’enseignement de l’Eglise, depuis la reconnaissance des apparitions par Mgr Laurence et la vie concrète des pèlerins venus ici auprès de la grotte de Massabielle.

Les textes de ce jour de fête nous éclairent et nous guident sur le sens profond de cette démarche et de confiance auprès de Marie. Marie, l’image de la Jérusalem nouvelle, de l’Eglise qui se rassemble pour célébrer  Celui qui lui donne la vie et lui ouvre l’avenir, oui « debout Jérusalem ! Resplendis ! » Disait déjà l’auteur du livre d’Isaïe.  « Elle est venue la Lumière et la Gloire du Seigneur s’est levée sur toi. Les nations marcheront vers Ta lumière et les rois vers la clarté de ton aurore, tous ils se rassemblent ! Ils viennent vers Toi ! »

Les difficultés du monde présent, celles qui touchent chacun personnellement, mais aussi les grands drames qui touchent le monde, la fragilité de l’unité de la paix, les conflits multiples qui éclatent, les inégalités entre les peuples, les mouvements de population pour échapper à la mort ou à la misère, les difficultés de l’Eglise dans son fonctionnement, dans la crise des abus, les souffrances endurées par les victimes, l’infidélité de certains des membres de cette Eglise et la mauvaise gestion de ces situations, mais aussi  la fragilité devant les difficultés de transmission de la Foi et l’indifférence grandissante de l’individualisme contemporain. Toutes ces difficultés qu’il s’agit de prendre en compte ne doivent pas occulter l’Espérance fondamentale qui est Celle du Seigneur pour son peuple.

Oui, aujourd’hui avec le texte de l’apocalypse, nous pouvons regarder, déjà contempler, le ciel nouveau et la terre nouvelle où résidera la justice. « La Jérusalem nouvelle ! Je l’ai vu qui descendait du ciel d’auprès de Dieu » nous dit Jean,  « prête pour les noces comme une épouse parée pour son époux, voilà la demeure de Dieu parmi les hommes. Il essuiera toutes larmes de leurs yeux et la mort ne sera plus ! Oui, voici, dit le seigneur, je ferais toutes choses nouvelles ». Cette nouveauté c’est celle de la Foi, celle du salut. Dans sa mort et sa résurrection, une fois pour toutes, cette nouveauté c’est l’Amour de Dieu pour chacun, pour chacune, quelle que soit son histoire, quelque soit son chemin, quelles que soient ses difficultés, la nouveauté c’est celle que manifeste Marie à ceux qui viennent se confier à Elle à la suite de Bernadette. Le Seigneur le dit dans la texte de l’apocalypse :  « celui qui a soif je donnerai l’eau de la source de vie gratuitement. Je serai son dieu il lui sera mon fils ». Marie nous invite à venir à cette source pour y boire et s’y  laver. La source d’eau vive nous fait retrouver la limpidité, la beauté de notre baptême ; la beauté de notre visage aimé de Dieu, la force de la vie qui traverse et transfigure toutes les épreuves.

A travers le récit du miracle de Cana, l’eau changée en vin lors d’un mariage en Galilée, nous voyons bien le rôle de Marie, toute en discrétion, toute en attention bienveillante. Le contexte pourrait nous sembler un peu futile. Bien sûr, un mariage est une belle fête et une source de bonheur devant l’engagement d’une femme et d’un homme et la beauté de l’amour qui nous dépasse, qui est plus grand que notre humanité. L’absence de vin à un moment de la fête est bien sûr dommageable mais finalement peut-être pas fondamental, pourtant l’attention de Marie va la conduire à en faire la remarque à Jésus. « Ils n’ont plus de vin ! » et la réponse de Jésus peut paraître déroutante, voir dure vis-à-vis de sa mère.  « Femme, que me veux-tu ? Mon heure n’est pas encore venue ! » Ce n’est pas l’heure encore du miracle, ce n’est pas l’heure de Jésus… son heure n’est pas encore venue !

Mais Marie ne se décourage pas ! Elle peut dire : « tout ce qu’il vous dira : faites le ! » Jean dit que le miracle de l’eau changer en vin fut le commencement des signes que Jésus accomplit. Il manifesta sa gloire et ses disciples crurent en lui. Le miracle de Cana, il n’est bien sûr pas d’abord pour que la fête soit réussie et que le vin soit bon. L’eau changée en vin évoque symboliquement quelque chose du projet de Dieu pour l’humanité comme cette eau  qui se mêle au vin pour le sacrement de l’alliance : «  puissions nous être unis à la divinité de celui qui a pris notre humanité » dit le prêtre dans la prière de l’offertoire. Il y a là comme le symbole d’autres noces, une autre alliance, cette alliance que Dieu veut nouer avec notre humanité, avec chacun de nous pour toujours en son fils Jésus. Alors Marie est vraiment celle qui intercède pour nous, Celle qui est attentive à la condition de chacun, Celle qui voit qu’il n’y a plus de vin, Elle entend, Elle écoute, Elle regarde toutes les prières qui s’expriment à Massabielle, toutes les intentions qui sont confiées, les souffrances et les espérances. Mais elle n’est pas seulement notre intermédiaire auprès de son fils, elle est aussi celle qui nous invite à l’écouter ce fils, à accepter ce qu’il peut nous demander. Comme aux serviteurs, Marie dit à chacun de nous : « tout ce qu’il vous dira : faites le ! » demandons à Marie de savoir écouter le Christ, de découvrir toujours plus profondément ce qu’il veut pour nous et d’avoir la force et la joie d’y répondre par notre foi et par notre vie. Oui, tout ce qu’il vous dira faites le ! »