Messe de clôture du pèlerinage diocésain à Lourdes : homélie de Mgr Jean Bondu

Homélie de Mgr Jean Bondu, évêque auxiliaire de Rennes, pour la Messe de clôture et d’envoi, le Vendredi 31 mai 2024 à la Basilique Saint-Pie X à Lourdes

Romains 12, 9-16 ; Cantique Isaïe, 12 ; Luc 1, 39-56

Êtes-vous bien au fait du calendrier liturgique ? Nous avons fêté le 25 mars, l’Annonciation, annonce de la naissance de Jésus. Aujourd’hui, nous fêtons la Visitation. Le 24 juin prochain, ce sera la naissance de Jean-Baptiste et puis le 25 décembre, évidemment, la naissance de Jésus. Vous voyez, si nous nous en tenons au calendrier liturgique, issu à la fois de la Bible mais aussi de la tradition de l’Église, en cette fête de la Visitation, Jean-Baptiste est à un mois de sa naissance. Quand Marie rejoint sa cousine Élisabeth, elle-même porte le Fils de Dieu depuis deux mois. Elle va rejoindre sa vieille cousine, nous dit l’Écriture, à un mois de son accouchement. Voilà quelques repères.

Ainsi, quand nous parlons de Visitation, ce n’est pas tant la Visitation de Marie à Elisabeth que la Visitation du Fils de Dieu à l’humanité. Et l’enfant que porte Elisabeth, Jean-Baptiste, reconnaît cette Visitation du Verbe de Dieu à l’humanité. Avant sa mère qui perçoit ce tressaillement en elle, il perçoit que, au-delà de la visite de sa cousine Marie, il y a, en elle, l’inouï : Dieu qui s’abaisse jusqu’à nous pour nous offrir sa présence, pour nous offrir sa proximité, pour nous offrir la même humanité que nous : une humanité renouvelée dans la vie divine.

Alors ce jour est un jour de joie, nous l’avions presque anticipé hier soir. Merci au groupe Bartrès de nous avoir déjà offert la joie de cette journée par anticipation, par la musique, par les devinettes, par le chant. Vous nous avez introduit à cette joie de la Visitation, comme Elisabeth qui est remplie d’allégresse. Et bien, nous aussi, grâce à vous, depuis hier soir, nous sommes remplis d’allégresse parce que nous cherchons l’essentiel.

Je retiens de cette Parole de Dieu pour nous ce matin deux choses. La première, Elisabeth, à travers la visite de sa cousine, Marie, a découvert la présence de Dieu au milieu des hommes. Marie vient porter le Sauveur du monde à sa cousine Elisabeth : « Comment ai-je ce bonheur que la Mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ? » Je retiens cet élément de l’Évangile pour que nous soyons attentifs dans chacune de nos rencontres à découvrir la présence de Dieu.

Je ne sais si vous vous en doutez mais nous sommes tous porteurs de Dieu pour nos frères. Ainsi, quand nous rencontrons quelqu’un, saint Paul nous disait tout à l’heure, « rivalisez de respect les uns pour les autres. » Il s’agit de considérer l’autre comme un être unique et merveilleux. Nous serons dans la bienveillance et dans la confiance parce qu’au cœur de cette personne habite le Seigneur. Et quelquefois, nous aurons à le lui révéler. C’est un amour plus grand que son amour humain, c’est une charité qui le pousse à se donner lui-même. C’est une humanité renouvelée déjà par le Salut qu’offre le Christ.

Si nous avons goûté la joie de ce pèlerinage, c’est parce que nous avons retrouvé une fraternité nouvelle. J’entendais des Hospitaliers me dire que cette semaine dans leur année est fondamentale, comme un point de repère, comme une source, comme le lieu paradisiaque de relations renouvelées. Eh bien chers amis, chers frères et sœurs, il faut qu’avec notre foi, qu’avec la joie d’être en Église, nous repartions chez nous pour offrir à nos proches, à ceux que nous ne connaissons pas également qui vont s’approcher de nous, pour leur offrir la reconnaissance de Dieu au milieu des hommes.

Bien sûr, la Visitation est un événement unique : le Fils de Dieu ne s’incarne qu’une fois. Il n’y a qu’une Elisabeth, il n’y a qu’un Jean-Baptiste, pour Le reconnaître et s’émerveiller. Mais nous autres, nous découvrons dans notre frère ou dans notre sœur, celui qui est aimé de Dieu, celle qui est aimée de Dieu et que Dieu espère dans son élévation, dans son épanouissement pour s’offrir au monde. Essayons nous-mêmes dans la rencontre de nos frères et sœurs de vivre une Visitation. Par lui, par elle, Dieu nous visite.

Le deuxième aspect que je retiens de cet Évangile, c’est le chant de Marie, le Magnificat : « mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu le Sauveur, Il s’est penché sur son humble servante. » Mais Marie n’en reste pas là, elle va déployer un chant d’action de grâce pour toute l’histoire du peuple de Dieu, avec Dieu : « Il a fait des merveilles, Saint est son nom. »

Quand Marie chante ce Magnificat, elle est au début de l’histoire de Jésus avec elle. Elle est enceinte de deux mois seulement ; mais déjà, elle chante la merveille que Dieu fait pour son peuple depuis toujours, particulièrement en ce moment où Il s’incarne.

Chers amis, nous recevons de ce chant de Marie la leçon qu’il ne faut pas attendre que tout soit réalisé pour nous, que nos rêves soient atteints, pour commencer déjà à chanter Dieu, à Le louer. Son amour est tellement grand qu’Il va s’épanouir dans notre vie, qu’Il va se réaliser, se révéler par notre vie. A la suite de Marie, en cette fête de la Visitation, nous pouvons nous aussi chanter le Seigneur dans sa grandeur et dans sa petitesse, son humilité qui nous rejoint jusque dans nos bassesses, pour nous en sortir, pour nous révéler la grandeur de notre humanité, pour nous révéler la beauté de notre humanité et pour nous offrir les uns aux autres. Oui, nous chantons Dieu par le Magnificat avec Notre-Dame, parce que même si le Paradis n’est pas encore sur Terre, nous en percevons les signes. Dieu est bien là au milieu de nous, le Christ est bien Celui qui nous sauve, qui nous fait passer de la mort à la vie, non seulement pour l’au-delà ; déjà, nous chantons le Magnificat.

Ce jour, si vous avez regardé votre petit livret de pèlerin, ce jour est sous la thématique du chemin de l’espérance. Eh bien, que nous repartions en Ille-et-Vilaine, chacun dans nos paroisses, avec cette espérance au cœur. Oui, Dieu, depuis l’Incarnation de son Fils, habite ce monde, Il nous offre sa présence. Et par Marie, nous chantons sa grandeur et son amour. Amen