Projet de loi sur la fin de vie : invitation à prier et à s’informer

Le projet de loi sur l’euthanasie est actuellement débattu à l’Assemblée Nationale. Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, propose aux paroisses du diocèse une intention de prière universelle et s’adresse aux catholiques d’Ille-et-Vilaine dans une lettre.

Intention de Prière Universelle

Cette prière pourra être utilisée aux Messes dominicales le 9 juin et/ou le 16 juin :

Seigneur de la Vie et de la Compassion, nous te rendons grâce pour les soignants qui, à l’image du Bon Samaritain, accompagnent avec compassion et compétence les personnes en fin de vie jusqu’à leur mort naturelle. Nous te prions pour les parlementaires qui sont tentés par la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté : éclaire-les. Permets que la dignité de tout être humain, créé à ton image, soit respectée grâce à un authentique amour fraternel.

Lettre aux catholiques d’Ille-et-Vilaine

Questions sur un projet de loi sur la fin de vie ?

 Chers frères et sœurs, voulons-nous collectivement une société de la fraternité qui nous engage tous à prendre soin de nos frères et sœurs les plus fragiles ?

Telle est la question qui est posée de façon brutale par le projet de loi en débat actuellement. En effet, ce projet de loi veut que l’euthanasie et le suicide assisté soient rendus possibles par la loi. Cela contredit l’idéal d’une société où nous prenons soin des personnes en fin de vie et où nous les accompagnons jusqu’à leur mort naturelle.

Voici rapidement quelques éléments pour bien comprendre les enjeux. Certaines personnes sont atteintes d’une maladie incurable. Nous avons mission de prendre soin d’elles de telle sorte qu’elles ne souffrent pas grâce à des traitements adéquats qui luttent contre la douleur. Les soignants, aidés de bénévoles, accomplissent cette mission en équipe et accompagnent chaque patient avec attention, délicatesse, compétence et respect de sa dignité. Ils le font en écoutant les désirs du patient.

Ces soignants savent que les traitements disproportionnés sont inutiles et font souffrir. La loi Leonetti de 2005 interdit de tels traitements. Cependant, depuis la loi Claeys-Leonetti de 2016, quand un patient éprouve une souffrance qui est « réfractaire » aux traitements et que son pronostic vital est engagé, il est possible de l’accompagner en lui proposant une sédation continue et profonde maintenue jusqu’au décès. Par cette sédation, le patient perd conscience.

Cette sédation n’est mise en œuvre que si le patient a donné son accord. Souvent, elle est réalisée une fois que le patient a pu faire les dernières rencontres qu’il désirait avec ses proches, parfois avec un prêtre. L’intention réelle des soignants et du patient est alors d’empêcher la souffrance trop lourde à porter, en acceptant de laisser la mort venir ; celle-ci viendra en raison de la progression de la maladie. Le patient meurt alors de mort naturelle. Il aura été accompagné jusqu’au bout avec humanité et respect de sa dignité.

Voilà la mission des soins palliatifs ! Les soignants, avec des bénévoles, y accomplissent un travail quotidien admirable. Hélas, ces soins palliatifs n’existent pas dans 21 départements. Il est urgent de les développer ! Tout le monde le souhaite. Or, le Gouvernement ne prend pas les décisions nécessaires. Il est prévu un plan sur dix ans, mais qui est largement insuffisant.

Au lieu de développer avec détermination les soins palliatifs, le projet de loi autorise l’euthanasie et le suicide assisté qui provoquent la mort. Ici, l’intention est clairement de donner la mort pour que le patient ne souffre plus : on supprime le patient pour arrêter la souffrance ! Certes, des verrous sont posés dans le projet de loi pour que l’euthanasie et le suicide assisté soient limités aux quelques cas assez rares. Mais les débats entre les députés ont déjà fait sauter des verrous. L’expérience dans d’autres pays nous alertent sur deux choses : l’élargissement des verrous est inéluctable ; les plus pauvres pâtiront le plus de cette loi si elle était adoptée.

Ce projet de loi contredit les soins palliatifs. La vocation du soignant est de soigner en supprimant la souffrance. Les soins palliatifs s’inscrivent dans une société de la fraternité où l’attention aux plus fragiles est au cœur de son organisation et de sa solidarité.

Provoquer la mort stoppe le soin, arrête l’accompagnement. Ce n’est pas un soin et ne le sera jamais ! Le projet de loi masque le fait de donner la mort en appelant euthanasie et suicide assisté du nom trompeur d’« aide à mourir ». On a même osé dire que donner la mort à une personne qui la demandait était un acte de fraternité. Saint Jean-Paul II a clairement enseigné l’éthique au sujet de la fin de vie : personne ne peut donner la mort à un être humain sous prétexte qu’il souffre (Évangile de la vie, n. 65).

La véritable fraternité consiste à soigner et à accompagner jusqu’à la mort naturelle en faisant en sorte que la souffrance soit au maximum supprimée. Jésus nous enseigne à prendre soin de nos frères et sœurs les plus fragiles : il nous a donné la parabole du Bon Samaritain qui a pris soin d’une personne « à demi-morte », et qui l’a conduite dans une auberge pour qu’on prenne soin d’elle. Prions pour que nous soyons tous habités par cette sollicitude du Bon Samaritain.

Rennes, le mardi 4 juin 2024
✠ Pierre d’Ornellas,
Archevêque de Rennes

Des textes pour réfléchir sur le sujet

Contribution de la Conférence des Évêques de France (24 avril 2024) :
Au projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie

L’ entretien de Mr Jean-Marc Sauvé (Le Figaro 13 mai 2024) :
L’aide à mourir, « c’est l’ultime ruse du libéralisme pour faire des économies sur l’État-Providence.» 

Lettre ouverte de Marie De Hennezel au Président de la République (Ouest France le 11 mars 2024) :
« Soigner par la mort n’est pas un soin »

Parole de Mgr Pierre d’Ornellas (Eglise en Ille-et-Vilaine juin 2024) :
Donner la mort n’est pas un soin !

Tribune de Mgr Pierre d’Ornellas (Le Télégramme 1er novembre 2022) :
« Provoquer la mort de son semblable n’est pas un soin »

Tribune du Card. François Bustillo (Le Figaro 18 mai 2024) :
Loi sur l’aide à mourir : la fin de quelle vie ?

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