PAROLE de Mgr d’Ornellas : « Servir les familles »
Comment l’Église, entièrement servante, ne serait-elle pas remplie de bonté et de miséricorde pour chaque famille ?
Paru dans Église en Ille-et-Vilaine n°269, novembre 2015.
Le synode consacré à la famille est achevé. Le pape François a prononcé peu de mots sur les saints Louis et Zélie Martin : ils ont « construit jour après jour une atmosphère pleine de foi et d’amour ». Leur canonisation est, au cours de ce synode, une parole éloquente qui suffit : l’amour vécu, selon la vocation d’époux et de parents, est un trésor sans prix pour le bien de la société, pour la beauté de l’Église, et pour la vérité de l’être humain créé, homme et femme, à l’image et la ressemblance de Dieu.
Sans attendre l’Exhortation post-synodale que ne manquera pas de nous donner le pape François, je voudrai attirer l’attention sur un point. Pour cela, je m’inspire d’une réflexion de saint Paul qui est confronté à un dilemme douloureux : ses frères juifs, en grande majorité, ne reconnaissent pas que Jésus est le Messie. Aux yeux de l’Apôtre, les chrétiens, issus du judaïsme ou du paganisme, sont fidèles à la Révélation de Dieu. Eh bien, Paul avertit que personne n’est supérieur aux autres : tout est œuvre de la miséricorde de Dieu, c’est-à-dire de son dessein d’amour gratuit et fidèle. Ainsi, Paul sait que Juifs et chrétiens sont ensemble pris dans l’amour de Dieu qui fait miséricorde aux uns et aux autres. Aux chrétiens issus du paganisme, il dira même : « ne va pas faire le fier ! »
Cette réflexion de Paul est éclairante. En effet, la fidélité de l’amour dans la vocation conjugale et parentale est indéniablement un tout, à la fois un trésor qui porte du fruit et un chemin de sainteté. Il est juste et bon que l’Église accompagne et encourage cette fidélité. Celle-ci est souvent heureuse, parfois mise à rude épreuve ; elle trouve alors un élan nouveau dans le pardon mutuel, la tendresse retrouvée et l’échange bienveillant renoué. Nourrir l’amour mutuel des époux et l’amour des parents (sans oublier celui des grands-parents) pour leurs enfants demeure un service indispensable de l’Église qui sait quelle force et quelle lumière leur apporte la foi chrétienne.
Cela n’altère en rien l’attention que l’Église a mission de porter aux familles où la fidélité à soi-même, au conjoint ou aux enfants est blessée d’une manière ou d’une autre. Oui, il est juste et bon d’être auprès de chacune de ces familles de telle sorte que l’amour qui y est vécu soit reconnu et accompagné, nourri et fortifié pour affronter les épreuves ou les contradictions, éclairé et ressourcé à la lumière de la vérité que Dieu fait luire par sa Parole reçue en son Église. Cela n’est possible que si chaque famille se sent accueillie avec douceur et rejointe là où elle en est.
Quelle que soit l’histoire des familles, en chacune brûle, avec plus ou moins d’éclat, la flamme de l’amour. Chacune a ses joies et ses difficultés, ses épreuves aussi. Chacune est l’objet de l’amour délicat et fidèle de Dieu. Comment l’Église, entièrement servante, ne serait-elle pas remplie de bonté et de miséricorde pour chaque famille ? Cela commence par l’attention portée à la qualité de la préparation au mariage. Cela exige créativité et souplesse pastorales pour que chaque famille se sente chez elle dans la communauté chrétienne (paroissiale ou scolaire) qui prie, aime et accueille avec joie.